vendredi 13 septembre 2013

Rapport de la mission québécoise


Le rapport rédigé par l'équipe québécoise dresse le bilan d’une mission de 12 jours qui s’est déroulée principalement en France, mais aussi en Suisse et en Allemagne. Les différentes visites réalisées dans des parcs nationaux (existants ou en projet), parcs naturels régionaux, forêts communales, réserves intégrales, forêts privées et autres territoires ont permis de documenter une variété de contextes qui permettent d’harmoniser la conservation de la nature avec l’utilisation durable des ressources naturelles. L’équipe québécoise a pu constater qu’une institution aussi importante que le « parc national » peut s’établir et se gérer selon le principe de conciliation de la protection de la biodiversité avec l’exploitation des ressources naturelles, sur la majeure partie du territoire protégé. La sylviculture peut ainsi être mise au service des objectifs des aires protégées lorsqu’elle se traduit en actions de restauration du patrimoine naturel, tout en permettant une production de bois diversifiée. Dans tous les cas rencontrés, l’aire protégée est une construction collective, souvent basée sur un concept de charte de territoire qui assoit l’entente entre les communautés sur les paramètres de protection et d’utilisation durable du territoire. Il en résulte que la foresterie peut jouer un rôle de restauration tant sur le plan social que sur le plan écologique quand elle est bien coordonnée avec les différents efforts de conservation du patrimoine naturel et culturel. Conséquemment, les aires protégées polyvalentes, qui sont l’objet d’une expérimentation au Québec, pourraient devenir des sites de pratiques exemplaires en matière de développement durable. Six recommandations, découlant de ces constats, sont exposées dans ce rapport.
Dans l'ordre habituel : Marie-Ève Deshaies, François Brassard, Lola Desbourdes, Amélie Denoucourt, Aurélia Rodrigues, Robert Lindeckert, Louis Bélanger, Jean-François Lamarre, Jean-Pierre Jetté et Jean Bergeron au pied d'un très vieux chêne de la forêt d'Haguenau.

vendredi 21 juin 2013

Table ronde

La mission s’est terminée en après-midi autour d’une table ronde sous la présidence du maire d’Offendorf, monsieur Denis Hommel. La discussion a débuté par une présentation du maire qui nous a permis de mettre en contexte l’évolution de la forêt Rhénane en fonction de la canalisation du Rhein et des enjeux de restauration écologique qui se sont présentés au fil du temps. La protection de cette forêt alluviale permet de maintenir une relique de l’écosystème forestier d’origine.
 
Par la suite, la discussion s’est poursuivie sur les visions de chaque intervenant en matière de conservation des forêts. Certains prônaient la libre évolution des écosystèmes alors que d’autres soutenaient que l’homme peut jouer un rôle dans ces écosystèmes. Nous en sommes venus à la conclusion qu’il est nécessaire de faire des zones de conservation stricte qui cohabitent avec des zones de conservation polyvalente afin d’intégrer les dimensions de développement durable à la conservation de la nature. Dans tous les cas, l’adhésion sociale est un prérequis à la réalisation des activités de conservation sur le territoire.


Une forêt vivante à Haguenau


Cette forêt indivise de 134 km2 est gérée conjointement par la ville et l’Office National des Forêts (ONF). Cette gestion conjointe entre la communauté et l’État est historique, puisqu’elle se fait depuis 1434. Longue expérience de gestion d’une forêt de proximité, tel qu’on les nomme au Québec.

La ville et l’ONF viennent d’adopter, en 2012, un nouveau plan d’aménagement pour les 20 prochaines années, dont les 3 principales orientations sont :

-->Protéger les milieux naturels et les espèces vivantes.
-->Produire du bois d’œuvre de qualité.
-->Accueillir le public et protéger le patrimoine.

Ce plan d’aménagement comprend aussi des mesures d’adaptation au changement climatique (réchauffement et assèchement). L’une d’elles consiste à favoriser les espèces forestières mieux adaptées à ces nouvelles conditions comme le chêne sessile.


La récolte de chênes de qualité est d'ailleurs l’un des principaux revenus provenant de cette forêt. C’est pourquoi beaucoup d’attention est accordée à la sylviculture de cette essence.

jeudi 20 juin 2013

Visite de la réserve transfrontalière d’Adelsberfg – Lutzelhardt


Elle serait la première réserve biologique intégrale transfrontalière – située entre l’Allemagne et la France - à avoir été créée en Europe. Elle couvre une superficie de 400 ha. Certaines espèces aviaires plus rares refont leur apparition dans la région. Toutefois, la forte présence des cervidés et du sanglier nécessite le maintien de la chasse dans ce type d’aire protégée à gestion stricte. Situation souvent rencontrée dans les forêts et réserves intégrales d’Europe.



Rencontre au Parc Naturel Régional – PNR - des Vosges du Nord


Comment prendre en compte la conservation et permettre la pérennité de l’économie locale ? Tel est le principal défi du PNR des Vosges du Nord. M. Éric Brua et son équipe nous ont présenté les objectifs de ce type d’aire protégée. Le développement durable des communautés locales est donc au cœur de la mission du parc. L’économie est ici identifiée comme un moyen pouvant faire évoluer les forêts vers un état plus naturel ; l’aménagement forestier qui vise à atteindre une structure de futaie irrégulière (régénération naturelle, diversité d’essences et d’âges) est une stratégie économique et écologique à moyen et long termes. La charte du parc est un « contrat total » avec le territoire. Elle permet de définir collectivement la manière de réaliser les différents volets du développement durable dans l’aire protégée. Cette charte comprend des mesures contractuelles négociées avec les différentes gestionnaires des ressources naturelles et culturelles. Ce mode de gestion peut aussi inspirer le développement des aires protégées polyvalentes au Québec.




La foresterie dans les aires protégées polyvalentes : faisabilité écologique et acceptabilité sociale


Le 19 juin dernier, Louis Bélanger, professeur chercheur à l’Université Laval au Québec, a présenté à l'Université de Fribourg la réflexion entourant l'intégration de la foresterie dans les aires protégées et les débats qu'elle soulève, tant en Amérique qu'en Europe. 

Voici un résumé de l'exposé et le lien vers la présentation.

Les aires protégées sont l’un des moyens privilégiés pour assurer la conservation de la diversité biologique. Ce vocable regroupe toutefois des territoires dont les objectifs et les cadres de gestion sont très différents.
Il existe, notamment, une distinction entre les aires protégées strictes (catégories I à IV de l’UICN) avec emphase sur la protection des écosystèmes, et les aires protégées polyvalentes (catégories V et VI de l’UICN) où la conservation de la biodiversité s’accompagne d’une certaine utilisation des ressources naturelles et d’une occupation humaine du territoire.
 

La gestion des ressources naturelles dans les aires protégées polyvalentes soulève présentement nombre de questions dans la lignée du débat international soulevé par les projets intégrés de développement et de conservation.
Certains ont qualifié de « nouveau débat de la conservation » l’opposition entre les visions d’un protectionnisme strict de la nature et celui d’une conservation de la nature intégrée au développement. C’est dans ce contexte qu’un projet de collaboration France-Québec a été élaboré pour documenter comment les activités forestières peuvent être compatibles avec le statut d’aire protégée polyvalente en France et au Québec.
 

L’un des enjeux majeurs pour la France et pour le Québec en cette matière consiste à trouver les moyens qui permettent l’harmonisation de la foresterie avec la conservation du patrimoine naturel et culturel des aires protégées dans leur territoire respectif. 

Au plan écologique, l’approche écosystémique à l’aménagement forestier ainsi que le concept de naturalité semblent constituer des bases scientifiques intéressantes pour encadrer la foresterie dans les aires protégées polyvalentes.
 

Par contre, les représentations sociales du concept d’aire protégée sont à explorer pour établir une stratégie de conservation qui soit socialement acceptable.




mercredi 19 juin 2013

Colloque à Fribourg : conservation et société

Jerry Franklin, professeur chercheur à l’Université de Washington, a présenté les défis du développement et la mise en œuvre de politiques d’aménagement forestier pour une société démocratique engagée dans le débat sur la conservation de la nature. Les politiques forestières adoptées ces 50 dernières années par les États-Unis traduisent l’importance qu’a pris la conservation de la nature pour le pays.

Au sens politique, la foresterie a toujours été plus sociale que scientifique. Ce constat est aussi applicable aux aires protégées alors que les principaux défis d’implantation sont souvent sociaux et politiques.

M. Franklin insiste sur l’importance d’établir une gestion participative avant que les divergences se  polarisent. Les acteurs locaux jouent un rôle clé dans cette gestion.

Il a beaucoup insisté sur l’importance de la foresterie écologique comme outil de gestion active de la biodiversité dans un contexte de conservation de la nature.

 

mardi 18 juin 2013

La forêt mixte : l’avantageuse diversité

Nous avons été reçus par Roland Burrus et son équipe dans une forêt privée de la commune de Courtavon en Alsace. Il s’agit d’une forêt mixte souvent dominée par le sapin qui est accompagné du hêtre, du chêne et de plusieurs autres espèces d’arbres selon les conditions édaphiques, qui sont d’ailleurs parmi les meilleures. Le sylviculteur, François Leforestier, gère cette forêt avec des objectifs de diversification des essences et de structure irrégulière. Le caractère mixte et irrégulier de la forêt est ici vécu comme un grand avantage puisqu’en plus de favoriser une diversité biologique et la résilience des écosystèmes face aux changements globaux, il offre une sécurité économique à long terme en permettant aux forestiers de répondre aux besoins du marché peu importe comment ces besoins évolueront. Cet exemple constitue une belle illustration de la façon dont l’écologie et l’économie peuvent être mutuellement bénéfiques.





Puis, nous avons visité l’entreprise Lutz qui ne mise pas sur la production de masse, mais plutôt sur la production personnalisée (des maisons pré-fabriquées) qui ajoute une grande valeur aux produits du bois, produits écologiques. Il s’agit donc d’une entreprise qui consomme peu de bois, mais qui crée beaucoup de valeur, ce qui pourrait être particulièrement intéressant dans les communautés environnant les territoires ayant le potentiel de devenir des aires protégées polyvalentes au Québec. 



En après-midi, le groupe a été reçu par monsieur André Linder, maire de la commune de Wolshwiller, par monsieur Michel Fernex, professeur émérite de la faculté de médecine de l’Université de Bâle, et par Olivier de l’ONF. Ils nous ont fait visiter la réserve biologique située dans la forêt communale et nous ont montré un aménagement réalisé pour la biodiversité : de gros hêtres ont été récoltés pour permettre à la lumière de parvenir jusqu’au sol et ainsi favoriser le retour de certaines plantes plus rares. Comme quoi l’aménagement n’est pas nécessairement en contradiction avec des objectifs de conservation.